
L’œuf ou la poule : là n’est pas la question. Au vain débat binaire se substituent ici une multiplicité de réflexions ramifiées à partir de l’œuf.
L’e dans l’o.
Le jaune dans le blanc.
Le tout dans la coquille, intacte – dans son nid, sa boîte, son panier – ou brisée.
Tout en l’œuf ramène au contenu et au contenant, à la suavité du dedans et à la robustesse du dehors, à la forme idéale, à la complétude, à la promesse de vie, à l’éclosion, mais aussi à la fragilité, à la frugalité généreuse, voire à la gourmandise quand les cloches s’en mêlent.
Tout modeste qu’il soit, l’œuf ouvre l’imaginaire.
Comme à chaque exposition, les galeristes d’Hectare vont, thématique en bandoulière, à la rencontre d’artistes qui la travaillent déjà, de diverses manières. Pas de sujet imposé ici, mais un fil rouge auquel s’arrime un faisceau d’idées, de savoir-faire, de récits même. De personnalités en somme.
Chez Catarina Silva, l’enveloppe chatoyante des œufs en chocolat se frotte au perlage pour former des talismans d’un genre nouveau. Felieke Van der Leest rend gloire aux animaux dans un univers fantasque fait d’audacieux mélanges, de clins d’œil appuyés et de sous-texte subtil. Broyant le solide de la coquille pour recomposer des formes neuves, souples et résistantes, Joohee Han remet en question l’ordre naturel. Impermanence, imperfection et éphémère habitent les natures mortes que Miki Asai exécute à base de coquilles assemblées par la technique ancestrale de la laque. Les œufs et leurs boîtes deviennent chez Xiaochuan Zhang des parures texturées, architecturées. En céramique ou en plastique, les coquetiers de Kanako Ebisawa prennent, en s’ouvrant, des allures de totem ou d’alcôve.
Du symbole à la matière première, de l’inspiration matricielle à la reproduction fidèle, de l’animal au minéral, Eggsquisite condense l’humble et le précieux. Une invitation à embrasser le raffinement de l’essentiel.